Catégorie : Je vous raconte ma vie

Yes we care

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Samedi, on fêtait le passage à Paris d'un ami parti vivre à l'autre bout de la terre, emmenant avec lui toute sa petite famille. Au pied levé, on avait appelé les copains pour une bouffe plus ou moins improvisée (à savoir que même notre mariage avait un côté improvisé à vrai dire, donc en réalité, rien n'est jamais vraiment préparé chez moi en matière de réception).

On était sept et autant d'enfants, de 3 mois à 10 ans. Un gros bordel dans notre appartement parisien qui bien que plutôt grand est malgré tout toujours trop petit quand 14 personnes doivent y trouver une place. Ce qui pour ma part ne m'a pas dérangée, je loge en général dans ces cas là dans la cuisine, une clope et/ou une coupe à la main et un vague plat à surveiller.

A bien y réfléchir, dans les appartements parisiens ce qui devrait toujours être plus grand c'est la cuisine, the place to be à la moindre fête. On peut dire ce qu'on veut, les fumeurs sont des leaders.

Pardon.

Il y avait donc du bruit, des pleurs, des cris, des rires, Kirikou en bruit de fond qu'aucun des enfants pour lesquels on l'avait mis – dans l'espoir de les canaliser – ne regardait mais que personne ne songeait à éteindre. Il y avait une pizza surgelée pour les kids qui avait attaché à la grille du four ("c'est pas grave on dirait des lasagnes", ont assuré les grands, de bonne composition), une côte de boeuf qui n'en finissait pas de cuire au point d'être à deux doigts de l'être trop. Cuite. Les patates quant à elles, avaient beau rissoler depuis 18h, manquaient de fondant. A croire qu'elles avaient décidé de m'emmerder.

Je crois pouvoir affirmer que pendant cette soirée, aucune conversation n'a pu être tenue plus de 17 secondes (à peu près le temps qu'il faut à des petites filles de 2 ans pour trouver une nouvelle idée de connerie ou une raison de s'écharper) et que la qualité réelle du repas n'était pas supérieure à celle d'un resto U. (Exceptés la salade, les cookies et le fondant au chocolat mais qui n'étaient pas de moi) (je n'en tire aucune conclusion mais c'est étonnant comme mes amies, lorsque je lance les invitations, tiennent absolument à apporter une partie du repas) (je veux dire, elles insistent vraiment).

Il manquait en permanence un couvert sur la table et on avait oublié d'acheter du pain. Ce qui s'est avéré moyennement grave, vu que le reblochon avait pris un coup de vieux qui le rendait assez peu mangeable.

La benjamine du groupe, 12 semaines au compteur, qui normalement ne fait jamais d'histoires pour dormir, a choisi ce soir là pour le lancement officiel de la fameuse angoisse de la nuit qui tombe. Elle est passée de bras en bras, le temps que sa maman puisse avaler trois bouchées.

Une soirée comme tant d'autres chez nous, en somme, dont on ne peut pas vraiment dire si elle était réussie ou complètement ratée. Pourtant, à un moment, je nous ai regardés, tous, comme si le temps d'un battement de cils, je me trouvais au dessus, à observer cet étrange ballet, ces verres rattrapés juste avant qu'ils ne touchent le sol, les larmes d'un bambin pour une sombre histoire de doudou pas prêté séchées à grand coup de moelleux au chocolat, une tresse tirée subrepticement, pas vu pas pris, une accolade virile mais qui voulait dire tu m'as manqué, des aveux soufflés entre deux portes sur la difficulté de tout gérer, des verres passant de main en main, le tout rythmé par les calvalcades des enfants dans les escaliers.

Je nous voyais, donc, beaux et fragiles, sereins ce soir là mais inquiets demain, à moins que ce ne soit le contraire. Je me suis dit que je n'ignorais rien ou presque des secrets de chacun et qu'eux savaient tout ou presque des miens. Les bébés qui mettent du temps à venir, ceux qui sont arrivés trop vite, les plans sociaux qui font chier, les examens médicaux qui parfois ne donnent pas de bonnes nouvelles, les envies de vivre ailleurs, les décisions de changer de vie en passe d'être prises. Rien n'en serait dit ce soir là ou brièvement, mais l'essentiel était que les uns et les autres, nous nous en soucions.

Juste avant de redescendre de mon nuage et de regagner la bruyante assemblée, j'ai eu cette dernière pensée. J'étais à ma place, là tout de suite. Ces joyeux drilles étaient mon noyau dur. Il en manquait quelques uns, deux en l'occurence qui n'avaient pu faire le chemin, un peu plus, même, parce que le noyau a de belles ramifications à Lyon ou Bordeaux. Mais voilà, dans cet appartement chamboulé, il y avait ceux dont l'amitié est le meilleur des garde fous.

J'écrivais la semaine dernière que j'enviais ceux qui savent qu'ils sont au bon endroit. Samedi, j'avais pour ma part consicence d'être avec les bonnes personnes.

 

Il est 4h00, Caro s’éveille. Ou pas.

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C'est sciemment que je publie ce billet à 4h30 parce que pour une fois ce sera l'heure réelle de mon réveil. Je dois être à 6h00 à Roissy pour aller passer la journée dans la belle ville de Lausanne.

Dire que ça m'enchante serait légèrement exagéré.

En vrai je suis au fond du trou. D'autant qu'il suffit que je sache que je dois me réveiller à l'aube pour ne pas dormir de la nuit. Et rien n'y fait, plus je me dis qu'il faut que je roupille, plus mon inconscient envoie des tonnes d'adrénaline à mon organisme histoire que je reste bien aux aguêts.

Il n'y a pas plus con qu'un inconscient.

En général, mon corps capitule dix minutes avant que retentissent les hurlements de l'alarme.

Grosse envie de mourir.

Puis retour à la réalité: tout ça pour monter dans un avion.

Grosse peur de mourir.

Bref, impossible pour moi de vous offrir un billet digne de ce nom, je l'écris à 21h01 et alors que je ne suis pas encore couchée je n'arrive déjà pas à dormir. ça promet.

Seul rayon de soleil: je vais visiter le centre de recherche de Rolex. Si ça se trouve demain, je vais réussir ma vie. Avant 50 ans.

 

Une clope ça va, deux….

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J'avais oublié que c'était bon de prendre un verre, puis deux, puis un dernier, et de rentrer chez soi par le dernier métro ou presque, un sourire idiot collé sur la figure.

J'avais également oublié l'enclume sur la tête le lendemain.

N'empêche qu'hier, j'étais entre tolbiac et porte d'Italie souriant niaisement, quand un grand gars qu'on pourrait qualifier des quartiers – casquette vissée sur la tête, grosses ray-ban aviateur sur le nez, bijoux de rappeurs  – assis en face de moi m'a adressé la parole, avec une politesse légèrement affectée (genre je suis correct mais je me fous un peu de toi): "Madame, vous n'auriez pas une cigarette, vous avez l'air d'une fumeuse ?" (j'ai conscience que ce n'est pas un compliment, même si je ne peux pas m'empêcher de penser que c'est quand même un peu cool).

Magananime, (bourrée), je ne quitte pas mon rictus débile et je lui sors une cigarette slim de fillette, en espérant qu'il ne va pas prendre ça pour une insulte déguisée, du style, tiens ta clope tapette.

"Hey, elles sont toutes petites, vos cigarettes, madame, donnez-moi en deux, s'il vous plait, ça sera mieux".

Ok, donc non seulement ça se voit que je suis fumeuse mais apparemment il y a aussi écrit en indélébile sur mon front que je suis un gros pigeon, que j'ai pensé, à l'aide de mes deux neurones encore sobres (les autres ne leur avaient laissé que la menthe et le citron vert, je ne vous dis pas les engueulades, ils m'ont saoulée).

D'ordinaire, vu la taille du mec, j'aurais filé le paquet, en priant pour qu'ensuite il ne me viole pas (je suis du genre à avoir peur qu'on me viole même à 4h de l'après-midi au beau milieu du Monoprix) (Alors qu'il y a de grandes chances que jamais personne n'ait même pensé un jour à me violer).

J'aurais donc donné le paquet, mon sac, ma carte bleue et le code. Au moment de la distribution de courage je devais être en train de faire caca, je ne vois que ça.

Mais là, l'alcool aidant (comme quoi ça n'a pas QUE des mauvais côtés, ça se saurait), je lui ai fait un plus grand sourire encore (= une grimace terrifiée) et j'ai refusé: "Non, une déjà, c'est bien".

Ecrit comme ça, ça en jette mais la vérité c'est que j'en menais pas large dans mon tanga.

Mais à mon grand étonnement, passée la surprise de m'entendre lui dire non (je rappelle que j'avais affaire à un profiler de la victime parfaite), il a carrément lâché l'affaire et s'est même fendu d'un merci et bonne soirée.

Comme quoi.

(J'adore dire comme quoi).

Si on était dans un épisode de Greys Anatomy ou autre série ricaine, on se dirait que la peur est mauvaise conseillère, que savoir dire non c'est se respecter, que les autres se comportent avec toi comme tu les autorises à le faire et encore tout un tas de bullshits.

Mais hélas on est juste à Paris 13e et je crois que le mot de la fin c'est que la picole fausse le jugement et désinhibe, pour le meilleur (là) ou pour le pire (autre gars, autre clope). Et aussi que souvent, les bijoux bling bling, les casquettes de rappeur et tout qui va avec cachent un coeur d'or. Ou pas.

Edit: Hier, miraculeusement, un spermatozoide et un ovule se sont tournés autour et fait la cour. Et alors que les conditions n'étaient pas optimales, il semblerait que la rencontre ait fait des étincelles. Hier, ma copine Lily m'a mis ce texto qui m'a bouleversée, suivant pas à pas son épopée depuis deux ans: "Il y a un embryon !!!!!". Il reste des dizaines t'étapes, comme elle le raconte si justement sur son blog, il faut que ce micron bébé tienne le coup pendant son transfert et s'accroche comme un champion dans sa nouvelle maison. Mais voilà, quoi, c'est une si bonne nouvelle…

Chignon, camel, rose-kaki

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Comme ça, en passant…

– J'ai essayé comme une dinde tout mon lundi de faire un chignon comme la douce Anne-So de Cachemire et Soie. Mis à part l'air très con que ça a dû me donner, je voudrais quand même bien savoir pourquoi chez moi ça ne marche pas. Truie de mère nature.

– J'ai acheté un vernis chez OPI – dont je vous donnerais bien le nom mais j'ai une de ces flemmes de le chercher – qui est à mon avis l'exacte réplique du kaki-rose dont on nous rebat les oreilles partout (= dans le Elle et le Grazia) comme étant le direct descendant du must du printemps 2009, une sorte de taupe foncé. Enfin je ne sais plus. On est d'accord, je n'ai aucun avenir dans la beauté et personne ne va me demander d'aller coacher les filles qui vont défiler bd Haussman pour les Galeries Lafayette. 

– Je suis tombée la tête la première dans Modern family, la série américaine la plus drôle depuis Friends. Bon, à compter de l'épisode 8 environ, c'est un peu moins percutant. Mais enfin tout de même. D'autant que la série marque le retour du mythique AL BUNDY. Qui a vieilli, grossi, mais rien perdu de son mordant. Culte.

– J'ai oublié dans mon billet sur les protège-cahier sa race de parler du très ingénieux concept de couvrage de livres inventé par Handicap international. En plus on fait une bonne action en l'achetant et même la carpe que je suis devant une paire de ciseaux, du film transparent et un livre scolaire peut s'en sortir. J'entends néanmoins une voix qui ne m'est pas inconnue beugler depuis la cuisine que je suis sacrément gonflée rapport que c'est lui qui s'est farci les 123 bouquins cette année. D'un mesquin.

– Je milite pour une externalisation de la prise en charge de Rose jusqu'à ses 3 ans. Ou 10. Ou 25. En tous cas je suis contre le fameux passage des deux ans. Vraiment. Très. Beaucoup. Contre.

– Hier, Margaux Motin m'a linkée depuis son facebook.

– HIER MARGAUX MOTIN M'A LINKEE DEPUIS SON FACEBOOK.

– Je ne vois pas par conséquent ce qui empêcherait désormais Philippe Jaenada de me dédier son bouquin ou Hugh Laurie de me proposer de lui écrire ses textes. Adieu monde d'en bas, c'est vrai qu'on respire mieux depuis les sommets du succès.

J'ai déjà DEUX choses camel. Des bottes de la redoute qui tombent en plissant sur mon mollet (même que c'est fait exprès ce qui je crois ne m'était jamais arrivé) et une sorte de veste sans manches de chez Monoprix qui n'est pas une cape mais pas loin tout de même. Je pense que toute la fashionisphère devrait décréter dans les heures à venir que le camel c'était une grosse blague des rédactrices de mode, et que le nouveau noir c'est bien évidemment le lie de vin.

– J'ai maté après tout le monde "Tout ce qui brille" et j'ai été très agréablement surprise, j'ai bien aimé ces deux filles, leur façon de se chercher comme des mecs, le côté pas prétentieux pour deux ronds du truc. Et puis la chanson de Véro Sanson, quoi. Je me la traine depuis une semaine. Mais même pas je leur en veux. Mes collègues un peu.

Voilà, comme c'est mercredi, je vous laisse avec quelques photos de mon quartier, prises dimanche alors que l'été jouait un peu les prolongations. Je vous conseille les soupes du PHO 14, ce sont les meilleures du coin à mon sens et leur Bo Bun déchire tout. Et comme dirait une vieille pote – la fille qui s'y croit pas du tout -, chantilly power sur vos faces. Et une bise à caro(roca) aussi, qui a sorti les griffes comme une princesse.

Edit: j'adore l'idée que Margaux Motin m'ait linkée après un billet un poil scato. Même si je ne ferai jamais aussi bien que son post sur les tampons trop pleins. Jamais. Respect éternel.

Edit2: J'allais oublier, mais wouah, la manif, quoi ! Les jeunes au turbin les vieux au jardin, yeahhhhhhh !

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Sobriété quand tu nous tiens…

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Un exemple de réhabilitation super réussie à l'angle choisy tolbiac, avec un chouette café, "l'âge d'or", une résidence universitaire et une autre à loyers modérés. Moi je dis big up à la mairie du 13e.

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Franchement quand on pense que toute la blogosphérita part à londres tous les quatre matins immortaliser des cupcakes d'opérette alors qu'à deux pas on a des gâteaux verts et roses. Gniii, quoi.

Psychologie magazine, Emmanuel Carrère et moi

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Photo d'Ed Alcock

Il y a quelques semaines, j'ai reçu un mail d'une journaliste de Psychologie magazine, me demandant si j'accepterais de figurer dans un article consacré à l'autofiction. Tiraillée entre ma crainte de m'exposer (la bonne blague) et ma vanité excessive, j'ai réfléchi un bon moment (une nano-seconde) avant de répondre que ma foi, pourquoi pas. Rendez-vous fut pris un jour de juin à la pause déjeuner, pour un entretien autour d'un poulet fermier patates sautées.

"Il y aura trois témoignages d'auteurs: vous, une directrice de collection belge et Emmanuel Carrère", m'explique Christine Sallès en préambule. "Groumpf (avalage de travers de mon sot l'y laisse), vous allez rire, j'ai cru que vous aviez parlé d'Emmanuel Carrère", ai-je articulé avec difficulté (va te faire interviewer avec du poulet fermier plein la bouche).

"Oui, oui, lui même en personne, a répondu la journaliste, il n'accepte pas souvent ce genre de chose, mais là, il était ok".

A ce moment là, il a fallu appeler les secours pour me réanimer, je venais d'être victime d'une explosion de melon. Il y en avait partout c'était immonde.

Je me suis pourtant ressaisie, tentant d'oublier pour quelques instants que mon nom serait accolé à celui que je considère comme un des meilleurs écrivains français vivants et dont le dernier livre résonne encore en moi, des mois après que je l'ai dévoré. Comment dire ? ça m'a mis la confiance à un point que lorsque j'ai reçu le numéro de septembre de Psychologie, j'ai réalisé que j'avais du être légèrement présomptueuse durant mon échange avec cette charmante journaliste. Et vas-y que je parle de mon talent, et vas-y que je brandisse mes millions de lecteurs, et vas-y que je gonfle un poil le nombre de commentaires sur mes billets. La prochaine fois, je préfèrerais qu'on m'annonce que c'est à côté de Guillaume Musso qu'on m'a collée, ça m'évitera de me laisser griser.

Ceci étant dit, je me retrouve dans ce qui a été retranscrit, talent revendiqué mis à part, écart vaniteux qu'on mettra sur le compte de mon excitation à l'idée de frôler mon idole, fut-ce sur papier glacé uniquement. Je suis notamment très heureuse de la reprise de mes propos sur l'importance fondamentale que revêtent mes échanges avec vous. Démagogie mise à part, c'est ce qui me pousse tous les jours à écrire ici et c'est probablement ce qui m'empêche d'avancer dans mon projet de roman (la bonne blague bis).

Après l'entretien avec Christine Sallès, il y a eu la rencontre avec Ed Alcock, photographe de son état (et pas des moindres, allez voir son site, le gars n'est pas un amateur). Accessoirement, bombe anglaise aux yeux d'un bleu indécent et à l'accent terriblement charmant. Sans oublier des cheveux poivre et sels. Et ondulés.

Non, je ne crois pas qu'il me lise.

Oui, il semblerait qu'il ait donné l'adresse du blog à sa femme.

En effet, c'est gênant.

Mais il ne s'est rien passé.

Hélas.

Enfin, il ne s'est rien passé, au sens biblique du terme. Parce que sinon, comment expliquer qu'alors qu'on avait passé plus de trois heures à shooter (oui, en français, shooter se dit "tirer", absolument) dans tous les coins de la maison (enfin, le salon et l'escalier, le reste étant impraticable sans matériel adapté), Ed la bombe m'ait rappelé une semaine après pour me dire qu'il s'était produit quelque chose de totalement inédit, à savoir que le miroir de son Hasselbled (mais si, ces vieux appareils argentiques, la crème de la crème des photographes) s'était légèrement déboîté et que toute la péloche était à jeter ?

Tu parles.

Maintenant que tout ça est derrière nous, sache, Ed, que je n'ai jamais avalé (hum) ton histoire à dormir debout. Tu ne pouvais tout simplement pas m'oublier. Comme je te comprends.

Toujours est-il que par conséquent, Ed est revenu une seconde fois. L'occasion pour lui de constater que je n'ai donc qu'UNE tenue shooting, à savoir ma robe monoprix noire en viscose. L'occasion également de se voir confirmer ma totale nullité expressive dès que j'ai en face de moi une personne censée faire ressortir le meilleur de moi même. Il faut dire que Ed – la bombe – me parlait énormément en anglais. A sa décharge, il m'avait demandé si je comprenais et j'avais répondu "lu écrit parlé" (l'habitude de mentir sur mon CV sans doute). (En vrai, j'ai bafouillé "I speak a little bite", ce qui m'a valu un fard pas possible à l'idée qu'il ait pu imaginer que je venais d'émettre un doute sur ses attributs). Douze ans, j'avais.

Trève de galéjades, le résultat de ces deux séances me ravit, je ne vais pas faire ma fausse modeste, pour une fois. Surtout, j'aime cette photo pour tout ce qu'on y voit pas. Ed travaille en effet énormément sur la lumière (ça se sent que ça m'excite quand j'écris ça ?) et donc derrière lui, il y avait un énorme projecteur braqué sur moi. Et nichée sur le canapé, ma fille aînée tendait à bout de bras un réflecteur. Une vraie petite assistante (en pamoison elle aussi) dont la présence bienveillante a sûrement contribué à ce rire que je cache derrière mes cheveux. A moins que ce ne soit une des plaisanteries lancées dans sa langue natale par Ed, à laquelle j'ai pouffé, faisant mine d'en avoir saisi toute la subtilité. Alors qu'à coup sûr il me demandait de croiser les bras. C'est le risque.

En voyant la photo, le churros – qui a vu Ed et l'a instantanément détesté – a eu cette phrase qui résume tout: "putain c'est dingue, on dirait que c'est beau chez nous. Et propre, aussi". 

Après, il a ajouté: "Et toi t'es super bonne". Ensuite il a eu des gestes totalement dénués de subtilité mais pas vraiment désagréables. Heureusement qu'il n'avait pas un Hasselbled avec lui parce que je ne vous raconte pas comment qu'on aurait déboîté le miroir.

Alors pour ça, Ed, mais aussi pour cette attitude que tu as su immortaliser et qui je crois me ressemble (d'autant qu'on ne voit pas mon visage), merci. Et une bise à la femme de Ed si elle me lit. Promis, hormis quelques instants de grande tension sexuelle et un léger déboîtement de miroir, il ne s'est absolument rien passé.

Edit: La vérité ? J'ai dans un premier temps trouvé la photo magnifique. Ensuite, j'ai gémi que s'ils avaient choisi un cliché où on ne voyait pas ma trombine c'était probablement parce que j'étais trop vilaine. Après, je me suis bricolé une histoire selon laquelle c'était pour jouer sur le contraste entre la nana qui s'expose sur le web et qui en même temps se cache. Je sais c'est naze mais mon égo est sauf.

Edit2: Par contre je suis très déçue qu'on ne voie pas mes pieds. J'avais mis mes Violettes vertes, quoi.

Edit3: Je tiens enfin à préciser que je n'ai absolument pas 40 ans mais 39 et quelques mois. J'ai d'ailleurs mis un contrat sur la tête de la SR de Psychologie magazine.

Edit4: Merci à Christine Sallès et à Ed. Et aussi à Emmanuel C.

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Edit et fin: J'avais fait un minute par minute en deux épisodes sur une séance photo, la première de ma vie. C'est ici et ici si ça vous intéresse. Il y a aussi ce billet qui relate une autre séance, plus… rock and roll.

Une soirée en transit

 

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A l'heure où vous lirez ces lignes nous serons probablement dans le ciel au dessus de Paris, Lyon, Nice ou Bastia. Pour mon plus grand plaisir, comme on l'imagine. D'autant qu'ils prévoient des orages, que le temps m'a l'air très incertain en Corse (on aura tout vu) et que je ne suis pas totalement sûre qu'on nous laisse décoller sans carte d'identité pour Rose. Non je ne l'ai pas perdue, j'ai juste réalisé il y a une semaine qu'elle aurait 2 ans passés au moment du départ et qu'en plus de nous coûter la peau des fesses cette petite plaisanterie risquait de changer la donne au niveau des papiers nécessaires.

Bon, en réalité, à l'heure où vous lirez ces lignes nous serons peut-être tout simplement en train de divorcer.

Je vous laisse néanmoins avec les photos d'une douce soirée hier chez nos amis Zaz et son nachos suprême – et petite fleur du printemps -, dans une maison de fée perchée en haut d'une tour chinoise. La lumière dorée traversait les rideaux de coton et le gâteau ramené de London par Manou était beau, beau, beau. On ne s'étendra pas sur son goût en revanche, les Anglais et la patisserie, quoi.

De la fenêtre de la cuisine, j'ai volé quelques clichés du coucher de soleil sur notre chinatown, qui n'a ces soirs là pas grand chose à envier à sa grande soeur de l'autre côté de l'Atlantique…

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Edit: Je devrais être présente par contumace au moins sur ce blog durant les deux semaines à venir. Au programme notamment, la suite et fin des aventures Venus (les allergiques sont prévenus) et je l'espère quelques cartes postales en direct de santa lucia di moriani…

Edit2: Un grand merci pour votre accueil si chaleureux hier qui m'a fait vraiment chaud, là, vous savez, près du coeur.

La possibilité d’une île

CapCorse

Non non non, ce blog n'est pas encore en vacances, même si mon esprit vagabonde déjà pas mal du côté de Cervione, Corsica, où je vais passer deux semaines… fin août.

Rhaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa. Fin août.

L'année prochaine je change mon fusil d'épaule et je pars AU DÉBUT de l'été. Parce que je ne sais pas pour vous, mes amis de galère, mais je trouve ce mois de juillet épouvantablement long.

Bref, un billet pour pas grand chose à vrai dire, qui vise essentiellement à geindre que yé n'en peux plou.

Mais comme je suis une blogueuse de contenu, moa madame, et que je ne veux pas décevoir ma copine de chez Glamour qui a besoin – putain – qu'on l'inspire, nous les pionnières du web 2.0, je vais jeter, là, négligemment, quelques idées, en vrac, pour toi, copine.

Grazia est, j'en suis de plus en plus convaincue, un journal de gauche planqué dans un groupe appartenant à Berlusconi. Ce qui est d'autant plus admirable, moi je dis. A lire notamment le chouette article sur Edwy Plennel cette semaine.

– Commencé la série Cougar Town avec Courtney Cox, la Monica de nos années Friends. Un peu too much, la Courtney, et surtout, passée entre les mains d'un faiseur de "duck-faces". Mais malgré tout, on la retrouve, aussi hilarante que dans Friends (elle me faisait beaucoup plus rire que Jennifer Aniston) et une fois de plus, une série américaine qui va assez loin dans l'anti-politiquement correct. A voir lors des longues soirées de juillet quand on sait qu'on ne va pas partir en vacances avant un bail. Ce qui est mon cas, vous l'ai-je dit ? Ah.

– Fini en deux soirs le troisième volet de "Spellman et associés", que j'aurais bien lu sur la plage, bordel. Mais – et c'est normal, vous ne pouvez pas le savoir, vu que je ne suis pas du genre à m'épancher – la plage pour moi c'est dans une éternité. Il n'empêche que ce 3eme épisode des aventures de Lizzie Spellman, détective déjantée affublée d'une famille de boulets est encore plus drôle que les deux précédents. A éviter cependant si on n'est pas fan des romans bizarrement structurés, entre carnet de notes, scénario et flashbacks multiples. Perso je suis adepte, un humour comme je les kiffe.

– Vu la semaine dernière, "Copacabana", avec Isabelle Huppert et sa fille dans la vraie vie, Lolita Chammah. Au départ j'ai eu un peu peur que ce soit un énième film sur Isabelle qui joue si bien les folles. C'est heureusement beaucoup plus subtil que ça, engagé, un film sur la précarité, le refus de coller aux normes, la maternité, la féminité après 50 ans et patati et patata. A voir aussi pour la toujours si juste et sous-employée Aure Atika.

Voilà, je m'en retourne compter les jours et mettre des croix sur mon calendrier, comme Vendredi sur son île. J'ai dit que je pars en Corse, mais pas tout de suite ? Roah, ça va, hein.

La fois où je suis allée voir quelqu’un

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Le week end dernier, j'étais donc dans
le midi. Et pour m'y rendre, j'ai pris un avion. Sans vouloir me
vanter – mais quand même un peu – il semblerait que je sois en train de
venir à bout de ma plus grosse angoisse, à savoir voler.

Attention, je pèse mes mots, ce billet pourrait s'avérer être un message d'espoir pour tous les phobiques quels qu'ils soient, que
l'objet de leur aversion soient les canards, les pigeons, les crottes
de nez, le vomi ou bien encore les craies contre un tableau.

Ça m'émeut.

Sans rire, je suis à deux doigts
d'aller remercier le « quelqu'un » que j'étais allée
voir il y a de ça trois ans, après avoir annulé à deux reprises
un voyage de presse en donnant des prétextes à la noix du style que
mon fils avait choppé la malaria. Juste pour ne pas avoir à entrer
dans ce qui était alors pour moi un cercueil volant.

La démarche n'était pas évidente,
j'ai reporté le rendez-vous une dizaine de fois et quand je suis
entrée dans le bureau du gars, je pleurais avant même de prononcer
mes premiers mots. Qui furent, dans un sanglot: « Je ne pense
pas avoir vraiment besoin de voir un psychologue, c'est juste que
j'ai peur de l'avion ».

Trois minutes après je parlais de ma
petite enfance et de cette fois où ma soeur m'avait mesquinement piqué mon pain au chocolat.

A la fin de la séance – 25 minutes
environ – je ne voulais plus partir, enivrée du plaisir de pouvoir
parler de moi, de moi et encore de moi à un professionnel qui avait
l'air, je vous assure, totalement subjugué.

Quand à la question "combien je vous dois" il a répondu 105 euros, j'ai mieux compris son air épaté.

A ce prix là on peut avoir l'air concentré.

Je me suis en allée en ayant
toujours aussi peur de l'avion.

La seconde fois, je me suis bien
recentrée, histoire de rentabiliser ce qui représentait à peu près
la moitié du prix de mon canapé Ikéa que je ne me décidais pourtant pas à acheter depuis six mois. Après que je lui ai
expliqué que j'en étais à mettre ma carrière en danger par des
stratégies d'évitement dignes d'un enfant de quatre ans, il a eu
cette phrase digne d'un thérapeute fort d'une dizaine d'années
d'études: « La peur n'évite pas le danger ».

ça fera 105 euros.

La troisième et dernière fois, il a
ajouté 1) que ma phobie ne ferait que grossir si je ne l'affrontais
pas et qu'au rythme où ça allait, dans deux ans j'étais incapable
de prendre un ascenseur. 2) toutes ces choses dont j'étais
persuadées qu'elles allaient m'arriver quand j'entrais dans un
aéroport ou lorsque j'arrivais à une tribune pour m'exprimer en
public (tant qu'à flinguer mon PEL j'avais pris la décision de
prendre le package multiphobique) n'étaient que le fruit de mon
imagination et non de la réalité. Je ne me souviens
plus très bien mais je crois qu'il a à nouveau répété que la
peur n'évitait pas le danger. Ensuite il a encaissé.

Moi aussi mais pas très bien.

Il n'y a pas eu de quatrième fois
parce que je suis de la famille des velléitaires et que j'éprouve
une certaine difficulté à aller jusqu'au bout des choses.

J'avais par ailleurs reçus entre temps quelques coups de fil angoissés de mon banquier, désireux de savoir si ces
chèques de 105 euros allaient se répéter toutes les semaines,
auquel cas il allait falloir songer à un deuxième emploi pour
survenir à mes besoins.

C'est là que prit fin ma deuxième
tentative psychanalytique. Je vous raconterai un jour la première
qui fut encore plus brève.

Inutile de préciser que je n'ai pas
vraiment constaté de progrès concernant mon petit problème les mois qui ont
suivi. Mais – ça me fait mal de l'admettre – les deux ou trois
phrases assénées par cet escroc se sont peu à peu frayées un chemin
dans mon cerveau récalcitrant. Et j'ai commencé à reprendre
l'avion.

Aussi j'avais épuisé mon stock d'excuses et à moins de m'attaquer à la mort de mes grands-parents – parade à laquelle j'ai renoncé dans un sursaut de maturité – je ne voyais plus trop comment faire pour échapper à l'inéluctable

Et là aussi ça me fait mal mais le
fait est que plus je prends ce engins de malheur et moins je panique. Comme si ma peur
que je visualisais auparavant comme une espèce de montagne massive et obscure
rapetissait à chaque atterrissage réussi.

Voilà, tout ça est très fragile,
j'en veux pour preuve que la semaine dernière, j'ai tout de même
réussi à oublier dans l'avion la carte d'identité de grande
chérie.

Ce qui aurait été tout juste chiant
si ce week-end mes deux grands n'avaient pas été censés partir à
Londres avec mes parents, ces derniers leur offrant une immersion
britannique pour leurs dix ans.

Je profite de ce long étalage de ma vie privée pour vous livrer, après cette incroyable
leçon de vie, une deuxième information à toutes fins utiles: il
est strictement impossible de faire refaire une pièce d'identité
sur le pouce à moins d'avoir un proche en train de mourir ou une
raison professionnelle majeure du genre une menace de licenciement.

Mes enfants sont donc restés à Paris,
mes parents aussi et je n'en finis pas de m'autoflageller depuis.
D'autant que je me souviens très précisément avoir glissé névrotiquement la
carte d'identité en question dans la pochette du siège devant moi lorsque
l'hôtesse m'a demandé de rabattre la tablette de ma fille avant
l'atterrissage. Et qu'il y a fort à parier que si je n'avais pas
obtempéré en deux secondes telle une possédée – des fois qu'une
tablette rabattue en retard crée des interférences avec la tour de
contrôle – en ramassant tout ce qu'il y avait dessus et le
bazardant dans un endroit que j'oublierais à coup sûr de vérifier
une fois l'avion posé, mes enfants et mes parents seraient à
l'heure actuelle en train de chercher leur direction dans
l'incompréhensible métro londonien. En baragouinant les deux mots
d'anglais qu'ils connaissent ("a plate" et "a glass"). Qui je le crains ne sont d'aucune utilité
lorsqu'on veut aller à Picadilly circus et qu'on se trouve à
Hammersmith. Genre.

Edit: je précise que ce billet n'est en rien une diatribe anti-psy, je suis juste pas forcément très bien tombée et n'étais surtout pas prête. Mais je sais qu'un jour où l'autre, j'y reviendrai si le besoin s'en fait sentir…

Mes chères cousines

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Quand on se retrouve avec mes cousines, qu'on se soit vues il y a dix jours ou deux ans, c'est le même joyeux bordel: non mais c'est dingue ce que tu as maigri // tu te souviens, quand tu mangeais la moutarde à même le pot, c'était dingue, il n'y avait que toi pour faire un truc pareil // et l'avion, tu y arrives, toi, maintenant, parce que moi c'est l'enfer // tu sais que je change de boulot, ça me fiche une trouille, pas sûre d'y arriver // et à Montpellier, la vie, c'est bien ? // Je ne pourrais pas vivre à Paris, je ne sais pas comment tu fais // et tu vas l'allaiter longtemps, tu penses ? // Je suis enceinte // On se sépare // C'est génial // C'est atroce // Je ne me supporte pas, là, regarde mes seins, ils sont énormes // j'ai arrêté de fumer, mais j'ai quand même apporté des clopes à l'eucalyptus // J'ai pris 20 kilos // Mais si, on peut boire un verre de vin quand on allaite, arrête, quand même ! // Cette robe est superbe, je t'assure // Et ton mec, il va comment ? // Il te ressemble, ton fils, c'est fou // il a les yeux bleus, moi, trois enfants et pas un seul avec les yeux bleus, mes gênes sont récessifs // par contre niveau culotte de cheval, ils se sont bien accrochés, les salauds // mère nature la truie // Et ta mère, ça va ? // 40 ans dans un an, j'en suis malade // Tu en fais dix de moins // Menteuse, mais redis-le moi quand même // On est connes non ? // Tu veux un autre enfant toi ?…

Et ça jusqu'à l'infini, toujours plus ou moins les mêmes conversations, la même évidence, les mêmes promesses de se voir à Paris, Lyon ou Briançon, promesses qu'on ne tiendra pas, parce que la vie fait que c'est comme ça, qu'on a nos vies, qu'on est des dindes, aussi. Et puis peut-être que tout simplement, savoir que quoi qu'il arrive, quelle que soit la distance entre nous, qu'importe le nombre d'années sans nouvelles, il suffira de deux dixièmes de secondes pour reprendre la conversation là où elle s'était arrêtée, n'incite pas à l'effort. Je crois que c'est peut-être cet aspect là que je préfère, ces bavardages suspendus qui demandent qu'à redémarrer.

Je les ai regardées lors de ce week-end express à Maraveire. Et je les ai trouvées magnifiques, mes cousines: Emilie, Stéphanie, Laurence, Prisca, Charlotte, Andréa, Naïma… J'aurais voulu leur demander la permission de les mettre sur ce blog, parce que toutes ont ce quelque chose de lumineux qui fait qu'aucune photo n'est loupée quand elles sont dessus. Mais, alors que je sais qu'elles me lisent pour certaines d'entre elles, je n'ai pas osé poser la question. Alors voici des petits bouts de mes cousines, des détails, des boucles de cheveux, l'arrondi d'une épaule, la blancheur d'un sourire, la bretelle d'un maillot. Je les aime d'être des sacrées chieuses, des qui parlent fort, qui envoient bouler leur mec quand il abuse, des qui osent dire que non, la maternité ne fait pas tout, des qui veulent tout, le boulot, le soleil, l'amour, les marmots, le cul, aussi.

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Edit: Ce billet, je l'ai écrit aussi en pensant aussi à Céline et Clotilde, qui nous manquent sur la plage, qui nous manquent autour de la table, qui nous manquent quand on trinque ou quand on regarde nos enfants.

Revoir Maraveire…

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A l'heure où vous lisez ce billet, nous sommes tous les cinq dans un avion qui nous emmène à Toulon. Trois petits jours de fugue en bord de mer, un tour au Lavandou pour voir Zaz, son roi des Nachos et sa tornade fleurie et puis direction Hyères, pour une grosse réunion de famille.

C'est ma grammy, celle qui dit "rudement" et "ravissant", qui a décidé qu'au lieu de nous réunir – ses enfants, petits et arrières, au bas mot une soixantaine d'allumés – à Noël quand il fait froid, moche et que tout le monde en a plein le dos du saumon fumé, elle nous inviterait désormais une fois par an dans le midi, dans cette maison qui fut celle de mon arrière-grand mère et qui aujourd'hui appartient à des grands oncles qui ont la gentillesse de la prêter pour un week-end.

Je suis née à quelques encablures, à l'hôpital de la Valette, et ai passé mes premiers mois dans un cadre légèrement moins luxueux, mes parents, jeunes, très jeunes, étaient à l'époque amoureux mais sans le sou. Il n'empêche qu'à trois jours j'étais sur la plage de Maraveire, avec comme unique protection, un fichu sur la tête. Parasols, crème solaire ? Vous plaisantez ! à ce moment là, on n'en parlait pas de tout ça. Sûrement qu'on avait tort, mais ce que j'en garde aujourd'hui, alors que ma vie toulonnaise ne dura qu'une dizaine de mois, c'est un amour inconsidéré pour les plages, toutes les plages…

Et quand j'atterris sur le tarmac de Hyères, tout, la lumière, les odeurs, les bruits, tout, me rappelle que je suis de là. Je n'ai aucune illusion sur la vie dans le sud, j'en connais les limites une fois le rêve estival terminé, je sais l'atmosphère souvent pesante de ces stations balnéaires clinquantes et rich-friendly. Pourtant, je donnerais cher pour y finir ma vie, un jour…