Catégorie : Envie de livres ?

THE liste de livres pour l’été 2012

DSC_0019
C'est légèrement à l'arrache (Ého, il reste deux trois personnes pour en profiter ou j'ai vraiment loupé tous les avions ?) que je finis par vous livrer ma sélection de livres pour cet été. Attention, il s'agit bien de bouquins que j'ai déjà lus et non de ceux que je compte emmener. Je pourrais choisir cette option mais j'aime toujours mieux être certaine d'avoir aimé avant d'en parler (il y a une répétition dans cette phrase sauras-tu la retrouver ?). Autre précision, comme je le disais il y a peu j'ai traversé une période assez aride de lectrice, pendant laquelle je n'ai pas réussi à me concentrer sur grand chose. Je n'ai donc pas des tonnes d'inédits à vous suggérer et certains des ouvrages cités dans ce billet ont déjà fait l'objet de billets, dans ce cas je renvoie sur la page concernée. J'ai également volontairement parlé de parutions un peu anciennes disponibles en poche, histoire de participer moi aussi au redressement productif MAIS rigoureux et surtout JUSTE. Enfin, ma conception du livre de l'été est celle-ci: il faut qu'il soit une source de plaisir. Ce qui en soi veut tout et rien dire mais en gros, sus à la culpabilité du bouquin léger, s'il est bien un moment où on a le droit de se mettre les neurones en jachère, c'est peut-être celui-ci.

Néanmoins, néanmoins, néanmoins… Le plaisir de lecture peut subvenir autrement que dans de la chick lit à pas cher (que je m'autorise parfois, de la même façon que j'aime les kinder bueno et les Voici sur la plage). On peut se retrouver complètement embarqué dans un classique réputé difficile, dans une saga de 800 pages où l'écrivain utilise un jargon québécois (thanks éternel à Despé pour les chroniques du plateau du mont-royal) ou dans un polar rageur et sanglant dans la pampa argentine.

Voilà c'est tout, place à la liste. Sachant que vous avez donc ici la version 2011, 2010celle de 2008 et de 2007.  (en 2009 j'avais poney). Et que dans la rubrique livres vous pouvez aussi trouver votre bonheur.

– Les séparées de Kéthévane Davrichewy: Je croyais en avoir parlé mais je ne le retrouve pas, si ça se trouve j'ai rêvé. C'est un vrai beau livre sur l'amitié féminine et toutes ses ambiguités, dévoré en deux jours et offert par une belle personne. Quand s'ouvre le roman, le 10 mai 1981, Alice et Cécile ont seize ans. Trente ans plus tard, celles qui depuis l'enfance ne se quittaient pas se sont perdues. Alice, installée dans un café, laisse vagabonder son esprit, tentant inlassablement, au fil des réflexions et des souvenirs, de comprendre la raison de cette rupture amicale, que réactivent d'autres chagrins.

– Mapuche de Caryl Ferey: Idem, déjà chroniqué, un polar sombre et violent mais aussi chaud, très chaud. Certains ont détesté, j'ai personnellement été enivrée et compte bien emmener avec moi les précédents opus de l'auteur.

– Tous les bouquins de Jane Austen: J'ai du mal à en choisir un parce que je les ai tous adorés. Si parmi vous il en est certaines qui sont passées à côté de la grande Jane, je vous en supplie, profitez de la plage pour vous y mettre. Il y a les histoires d'amour toujours contrariées puis finalement résolues mais aussi une peinture de l'Angleterre de la fin du 19ème siècle, un discours féministe s'il en est et un style tellement délicat qu'il est inimitable, PD James a récemment essayé d'écrire une suite à Orgueil et préjugés et s'y est à mon sens cassé les dents.

– Crépuscule de Michael Cunningham: Celui-ci c'est ma copine Julie qui me l'a offert pour mon anniversaire. Le genre de cadeau qui signifie: "je te connais, toi". New-York, elle est éditrice, il est galeriste, il se sent à la croisée des chemins et éprouve des désirs irrepressibles qui ne se dirigent pas tous vers sa femme. C'est écrit merveilleusement bien, c'est triste et sombre mais c'est beau.

– Lovesong, d'Alex Miller: Je l'ai fini hier soir et j'ai bien aimé, ce n'est pas non plus le chef d'oeuvre de l'année mais c'est une belle histoire d'amour, une façon assez inédite d'écrire sur la douleur que l'envie d'enfant inassouvie peut provoquer dans un couple. C'est un Australien qui écrit, sur une femme tunisienne installée à Paris dans les années 80, Sabiha, convaincue depuis toujours qu'en son sein sommeille la fille qu'elle est destinée à faire naitre un jour. Sauf qu'avec John, professeur australien et amour de sa vie, ils ont beau s'aimer, l'enfant ne vient pas. Très joli, vraiment.

– Les Spellman et associés contre-attaquent de Lisa Lutz: Chaque année donc je vous parle du nouvel opus de Lisa Lutz. Exemple typique de chick lit' qui n'en est pas vraiment. Polar, roman d'espionnage, saga familiale, je ne sais pas bien comment classer cet ovni littéraire mais c'est hilarant et même parfois émouvant. Commencez par le premier c'est mieux.

– Les blessures invisibles de Nicholas Evans: bouquin filé par ma dealeuse préférée et avalé d'une traite sur la plage de mon hôtel mauricien en mars dernier. C'est écrit par l'auteur de "L'homme qui murmurait à l'oreille des chevaux", qui a donné naissance au film éponyme (et que j'adore). Une vraie saga américaine, un livre plein de sentiments, de ressentiments. Il y est question de quête d'identité, d'amour fou, de l'ouest américain, et des conséquences dévastatrices des secrets de familles longtemps étouffés. Nicholas Evans est un conteur merveilleux, foncez. (par contre on pleure).

– Rien ne s'oppose à la nuit, de Delphine de Vigan: Je sais, j'en ai parlé et je suis loin d'être la seule. Mais si vous êtes passé à côté, il est temps de vous rattraper, vraiment c'est un bijou, un des plus beaux livres que j'ai pu lire.

– Le fils, de Michel Rostain: Egalement chroniqué, pour des raisons personnelles j'envisage de le relire, parce que j'ai rarement lu quelque chose de plus juste sur la perte d'un enfant.

– 1Q84 d'Haruki Murakami: C'est le seul que je n'ai pas lu mais juste commencé. Ma mère a adoré et je crois savoir qu'elle n'est pas la seule (genre c'est un best seller mondial, hein). A première vue ça me semble très prometteur et je ne serais pas étonnée que ce soit MA saga de l'été. C'est une trilogie qui se déroule au Japon sur fond de thriller fantastique et… je n'en sais pas beaucoup plus.

– Stephen mc Cauley: L'objet de mon affection. J'ai déjà du en parler mais je ne retrouve plus où. J'adore cet auteur très gay. Le livre a donné naissance à un film avec Jenifer Aniston il me semble. C'est l'éternel sujet d'une fille qui tombe amoureuse d'un garçon sensible, un peu trop. C'est écrit comme du Aristead Maupin je trouve et d'une manière générale j'ai aimé tous les bouquins du gars. Tout à fait emblématique de ce que j'aime lire l'été.

Voilà sinon en vrac: tous les bouquins de John Fante, ceux d'Aristed Maupin, les Jaenada, les Alison Lurie (Un été à Key West, formidable), les Jay mc Inerney etc etc etc… Et puis pour rire, aussi, Gail Parent, de la chick lit' de qualité à la sauce juive new-yorkaise.

Bonnes lectures !

Littérature jeunesse : les conseils de Marje, #4 bis

Piedkleberchronplace1
 

Aujourd’hui je cède donc le micro à Marje qui nous a écrit une nouvelle chronique tentaculaire, classée par âge et genre. Je peux vous dire que mes enfants valident à mort ses choix, mon fils étant totalement fanatique de Pierre Bottero et ma fille complètement accro à Malika Ferdjouk. Mais également très friande de Bottero. Comme à l’accoutumée, vous pouvez cliquer à la fin de la chronique sur le fichier PDF et l’imprimer avec en prime une mise en page bien plus lèchée que celle-ci !

Bonne lecture et merci Marje ! En lire plus »

Mapuche, de Caryl Ferey

Visite-guidees-de-buenos-aires
Je suis dans une phase où la lecture n'est pas aisée. Difficulté à me concentrer, à entrer dans un texte s'il est trop aride ou dans un récit s'il est compliqué. C'est quelque chose qui m'arrive, de manière cyclique, parce que je suis fatiguée, préoccupée par le boulot ou accaparée par des pensées qui ne me laissent que peu de répit.

Dans ces moments là, j'opte pour des polars, parce qu'il est rare que je ne me laisse pas finalement emporter par une intrigue si elle est bien ficelée. Après avoir lu en deux jours le dernier Connely – pas un des meilleurs crus à vrai dire mais j'ai l'impression d'écrire ça depuis cinq ans – j'ai aussi boulotté le PD James, sorte de suite d'Orgueil et préjugés qui ne m'a pas du tout convaincue, bien qu'ayant apprécié de retrouver les personnages de Jane Austen et notamment l'ombrageux Darcy. 

Et puis il y a eu Mapuche. J'étais passée à côté de Zulu, précédent ouvrage de cet auteur, maintes fois primé je crois, mais je sais que je vais me le procurer tant celui-ci m'a happée. Je n'ai jamais mis un pied en Amérique latine, mais je crois que Buenos Aires est l'une des villes que je rêve le plus de visiter un jour, d'autant plus depuis les carnets de voyage si savoureux de Pénélope à ce sujet.

Je fantasme sur les danseurs de tango, l'idée qu'il y a autant de psy que d'habitants, l'atmosphère européenne de cette ville aux antipodes, l'architecture hispanisante, et ses maisons colorées du quartier de la Boca… Ceci étant dit, la Buenos Aires de Mapuche est à des lieues de ces clichés, dépeinte sous aspects les plus sombres et montrée comme une sorte de plaque tournante de la drogue et de la prostitution. Il n'empêche qu'on entend malgré tout le tango entre les lignes et que le destin, haletant, de Jana la Mapuche, sculptrice indienne à la recherche de sa/son meilleur(e) ami(e) Paula, travestie et danseuse de revue, vous prend aux tripes. Mapuche c'est aussi un roman sur les heures les plus honteuses de l'histoire argentine, sur ces enfants qui furent volés pendant que leurs parents étaient torturés, tout ceci sous le regard bienveillant du pouvoir d'alors. 

Il y a aussi de l'amour, du vrai et du torride, entre Jana et Ruben, deux écorchés de la vie, à qui on ne la fait plus mais qui pourtant vont se consummer à nouveau, pour le meilleur ou le pire.

Lisez le, vous partirez loin.

Bonne journée

Là où j’écris un livre pour Cojean

Photo-30
Je ne parle pas souvent sur ces pages de ce que je fais de mes journées, hormis peut-être de mes articles pour Psychologies magazine*, probablement parce que ma collaboration avec ce journal a en quelque sorte découlé de ce blog. Mais il ne faut pas croire, je ne passe pas mes journées à regarder des séries américaines. Enfin, si, aussi, mais j'ai finalement décidé de ne plus m'en culpabiliser, après avoir bien réfléchi à la question j'en suis arrivée à la conclusion que c'était en quelque sorte aussi du travail (je pourrais tout à fait développer et expliquer en quoi c'est du travail mais ce serait long et fastidieux) (et sans doute de mauvaise foi).

Ce long monologue, donc, pour introduire ce billet quelque peu auto-promotionnel (mais pas tant que ça, je ne touche en effet aucun droit sur les ventes, par conséquent c'est de l'auto-promo désintéressée). Parmi les choses sympas que j'ai été amenée à faire dernièrement, il y a donc ce bouquin pour Cojean.

Photo-32

Rares sont les parisiens qui ne connaissent pas cette chaine de restaurants, pionnière en matière de fast-fooding "haut de gamme". Leurs restaurants se distinguent par les carrés de pelouse en vitrine et leur désormais célèbre jus d'herbe de blé ou encore leur cake au citron et graines de pavot, dont j'ai maintes fois parlé, avant même qu'on me propose cette collaboration.

D'aucuns ne manqueront pas d'arguer de la chèreté de ces restos et je ne les démentirai pas, les salades et sandwichs sont en effet plus onéreux chez Cojean que dans d'autres enseignes. Mais en préparant l'écriture de ce livre j'ai appris qu'il y avait plusieurs raisons à cela. La première étant la qualité des matières premières, sur lesquels les patrons sont intransigeants. Pas de sous-vide, peu d'additifs, aucun conservateur dans les soupes… Tout ceci a pour conséquence des aliments aux dates de péremption bien plus limitées dans le temps que ce que l'on trouve dans les rayons de Monoprix par exemple et une gestion des stocks bien plus serrée aussi. Les prix s'en ressentent forcément. Autre spécificité, l'engagement humanitaire de Cojean, avec un acheminement des invendus auprès d'associations les distibuant aux personnes dans le besoin.

Photo-31

Je ne vais pas développer plus avant, je ne suis nullement chargée de la communication de Cojean, mais sincèrement j'ai découvert une entreprise se voulant citoyenne et plus humaine il me semble que ce qu'on a l'habitude de voir dans la restauration. J'ai visité les cuisines et parlé avec des collaborateurs et si je me doute bien qu'ici comme ailleurs il peut y avoir des problèmes (l'avènement des bisounours n'est pas encore d'actualité, même chez Cojean), j'ai été assez impressionnée par la convivialité qui règne dans les équipes et la considération qu'ont Alain Cojean, fondateur des restaurants et Fred Maquaire, son associé, pour toutes les personnes qui travaillent pour eux.

Bref, j'ai vraiment aimé participer, même modestement, à la rédaction de cet ouvrage. Ma contribution s'est limitée à un texte introductif ainsi qu'aux petits "chapeaux" en tête de chaque chapitre. C'était la première fois que j'écrivais sur des recettes et j'ai adoré ça. Et le résultat est visuellement très beau je trouve. Cerise sur le smoothie: il y a la recette du fameux cake citron pavot. Et pour l'avoir testée, on n'est pas bien loin de l'original !

Photo-33

Voilà, c'est tout pour aujourd'hui, j'ai cru comprendre qu'il allait faire un temps de chien toute la semaine à Paris au moins, je nous souhaite donc du courage à nous les parigots pour affronter cet automne en été.

Edit: Dans les jours à venir je devrais être en mesure d'organiser un concours pour vous faire gagner des exemplaires de ce petit bouquin.

* Outre Psycho mag, j'écris aussi pour Cosmo.fr, des articles sexo que vous pouvez trouver en tapant Caroline Desages dans le champ "recherche". Je pige pour d'autres supports également comme Cosmétique magazine (un journal qui s'adresse aux professionnels du secteur) et quelques autres sur mes anciens sujets qui n'ont pas grand chose à voir avec ce blog ce qui explique que je n'en fait pas étalage ici.

Livres pour enfants (et plus grands) : la chronique de Marje #4

DSC_0209.jpg_effected
Vous en rêviez, Marje l’a fait, voici une nouvelle chronique de notre passionnée des livres pour enfants, adolescents et grands qui sont restés jeunes. Comme la dernière fois, je mets en fichier joint à la fin du billet le PDF de ce texte, avec illustrations et tout, que vous pouvez télécharger.

Avant de laisser la parole à Marje, j’en profite, puisqu’on est justement dans le monde de l’enfance, pour vous montrer quelques clichés d’une jolie boîte cadeau envoyée par Cathy et Requia, les fondatrices de My Sweet boutique. Je vous en avais déjà touché un mot, mais maintenant que j’ai vu un échantillon de ce qu’elles proposent, je sais que désormais c’est chez elle que je me fournirai pour les fêtes, tout est adorable et plutôt abordable je trouve. Et puis entre Cathy et moi c’est une longue histoire, nous nous suivons depuis le tout début de nos aventures respectives, alors rien que pour ça je suis drôlement émue de vous faire la promo de cette boutique toute douce. En lire plus »

Livres pour enfants (et plus grands) : la chronique de Marje #3

IMG_8529.jpg_effected-001
Nous vous l’avions promis, voici donc une troisième chronique de l’extraordinaire Marje, qui, j’en suis désormais convaincue, est faite de ce bois qui ne dort jamais. C’est absolument fascinant de voir à quel point elle vibre les livres qu’elle conseille, ce n’est plus de la passion, c’est juste… sa vie, je crois ! Marje avait fait un hyper beau fichier avec des photos pour illustrer les rubriques mais je n’ai pas réussi à le transférer correctement sur le blog. Mais… mais vous pouvez télécharger ce document à la fin du billet, vous l’imprimer et vous le garder de côté, c’est cool non ?

(épisode 1 et épisode 2)

Je laisse la parole à Marje ! En lire plus »

Labo d’écriture des Nouveaux talents #4

Photo de famille
Nos yeux piquaient hier quand la porte de notre maison bleue s'est refermée. Il faut dire que tant de confidences avaient été faites l'air de rien durant ces quatre jours… Parce que ne nous leurrons pas, je est un autre comme le disait si bien le bel Arthur. Et derrière Gisèle, Paul, Charles ou Mathilde, pour ne citer qu'eux, se cachaient évidemment certains d'entre nous. 

Ce fut d'ailleurs l'un des ultimes conseils prodigués par Bruno Tessarech: "un des secrets du roman c'est de parler de nous comme si on était un autre et des autres comme s'ils étaient nous". 

La dernière séance eut donc des airs de fin de colonie de vacances, avec échange de mails, embrassades et promesses de ne pas en rester là. Nous avons malgré tout travaillé, avec un peu de fébrilité, conscients que les textes que nous allions écrire seraient les derniers de cet atelier. L'occasion de faire se rencontrer, donc, nos personnages et ceux de nos camarades de labeur. A l'arrivée, des pépites, mariant des univers aussi différents qu'une ambassade au Japon et un troquet breton, un détective privé obèse et une jeune fille agoraphobe, un thésard en biologie avec un prof de droit ou encore un baroudeur revenu de Russie avec un vice-consul en fin de course.

Je ne dévoilerai pas les secrets de ces histoires, vous pourrez bientôt les retrouver sur le site des Nouveaux talents. Ce ne sont finalement que quelques bribes de romans à venir, mais ce qui est dingue, c'est que j'ai la ferme impression que ces livres existent déjà. Comme si notre imagination avait été tellement fertilisée que nous étions capables de remplir les blancs comme bon nous semble.

En parlant de blanc, je ne vous ai pas raconté la théorie des marges de Bruno. Une anecdote qui ne vous fera plus jamais lire de la même manière. Figurez-vous en effet que dans une page de livre, la place consacrée au texte est égale à la surface des marges. Pourquoi ? Parce qu'un texte a besoin d'espace. Et aussi parce que finalement, lire c'est à la fois s'imprégner des mots et des phrases mais aussi y ajouter sa propre interprétation. En somme, les marges sont là pour laisser la place à notre imaginaire. C'est beau, non ?

Voilà, juste avant de partir, alors que nous lui demandions comment faire pour évaluer la qualité de notre travail lorsqu'on n'a encore jamais confronté nos écrits à la lecture d'une tierce personne, Bruno nous a invités à prendre du recul, "oublier" nos manuscrits quelque temps, puis les relire d'un oeil nouveau. Il a ajouté que la qualité, finalement, n'était jamais que le reflet du plaisir que nous avions pris à écrire. Qu'une réponse positive d'un éditeur était un plus, certes, mais ne devait jamais être la seule validation de notre droit à écrire (je l'avais déjà dit hier, mais cela m'a semblé fondamental).

Nous nous sommes donc séparés après une dernière photo de famille, riches de ces quatre jours qui j'en suis sûre auront permis à chacun d'entre nous d'avancer un peu. L'une aura compris que rien ne vaut la fiction pour parvenir à relater une expérience personnelle, l'autre aura fait revivre un être disparu, un autre encore tiendra le sujet du roman qu'il rêvait d'écrire. Certains auront simplement vu se confirmer cette certitude: écrire est un désir inextinguible que rien ni personne ne peut éteindre.

Je ne sais pas si la fondation Bouygues Telecom renouvelera cette opération, ni sous quelle forme, le cas échéant. J'avoue avoir avec assez peu de subtilité suggéré l'ouverture d'une résidence d'écriture (de préférence en bord de mer) (je sens que mon inspiration y serait au top), voire la délocalisation du prochain atelier au salon du Livre de San Fransisco (il doit bien en avoir un). Je ne sais pas pourquoi, j'ai senti que je poussais peut-être le bouchon un peu loin.

Plus sérieusement, comme aux Cesars, je ne peux pas terminer cette saga sans remercier à nouveau Céline et Dorothée grâce auxquelles tout s'est déroulé comme dans un rêve. Mon dernier mot sera pour Bruno, dont je suis impatiente de lire le prochain livre. Il nous a confié repartir lui aussi regonflé à bloc, avec dans sa sacoche de nouvelles idées, des promesses de romans. Signe s'il en est que l'energie a bien circulé dans notre bulle enchantée…

Photodefamille2

Labo d’écriture des Nouveaux talents #3

 

  IMG_3585

Il aura fallu à peine trois séances pour que l'alchimie se fasse. Si les deux premiers jours nous n'étions encore qu'une addition d'individus, j'ai senti hier qu'un groupe avait pris corps, sorte de 13ème personnage silencieux mais essentiel à la maturation de nos écrits. 

Drôle d'expérience en effet que de ne pas être seuls face à la page blanche. S'il est une activité solitaire, c'est bien celle consistant à coucher des mots sur le papier. C'est ce qui en fait toute la beauté mais également la difficulté. Or là, exceptionnellement, bien qu'ayant chacun notre histoire à inventer, nous sommes ensemble, les uns contre les autres, même, exiguité de notre bulle oblige.

Je n'arrive pas à savoir si nous devons cette belle entente au hasard, à l'enthousiasme de Bruno Tessarech ou à ce qui finalement nous lie par delà nos différences évidentes: cette aspiration que nous n'avons, pour une fois, pas à garder secrète : voir, un jour, peut-être notre livre sur un présentoir.

Je n'ai et n'aurai sûrement jamais la réponse, mais les faits sont là. Sans prétendre à l'amitié, il règne entre les douze protagonistes une ambiance sereine et cordiale qui fait de notre maison bleue celle du bonheur. J'en veux pour exemple cette anecdote. Etant complètement stressée à la perspective de dire mes mots à voix haute, j'ai commencé au pas de charge, la gorge nouée. Bruno m'a invitée à ralentir, mais impossible de me détendre. Charles a alors accepté de prendre le relais, s'appropriant mon texte avec l'exact ton que j'aurais voulu être capable d'y mettre et surtout autant d'enthousiasme que si ce passage avait été de son oeuvre. Une générosité d'autant plus remarquable que la minute d'avant j'avais projeté sur ses chaussures (et une bonne partie de son pantalon) mon thé encore brûlant. Juste avant de flanquer mon ordinateur par terre. Puis mon téléphone. De quoi captiver mon auditoire, en somme. Comment se saborder en trois leçons, je pourrais probablement animer un atelier.

IMG_3588

Cette entente est d'autant plus précieuse que la fin est inéluctable et que dès ce soir, nous repartirons chacun chez nous, avec notre embryon de roman dont il est pour l'instant impossible de savoir s'il passera le printemps.

Peut-être qu'au gré des affinités, certains garderont le contact, quand d'autres disparaitront des radars. Peu importe à vrai dire, il restera cette attention bienveillante à chaque lecture d'un texte, l'absence totale de jugement ou de remarque se voulant "constructive" mais ruinant le peu de confiance que pas mal d'entre nous avons à l'intérieur de nous. Il restera les sourires, les secondes de silence suspendu après un écrit particulièrement intense que l'un ou l'une aura lu.

IMG_3610

Il restera cette incantation de Bruno que je n'oublierai pas: "les éditeurs ont ce pouvoir sur vous de vous publier ou non. Ne leur accordez jamais en revanche celui de décider de la qualité de ce que vous faites. Ils ne doivent pas être la cause d'un abandon de l'écriture".

Bien sûr, certains objecteront que l'on écrit toujours pour être lu. Mais aujourd'hui plus qu'hier, il y a tant de façons justement de diffuser sa prose, que l'édition n'est finalement qu'un moyen parmi tant d'autres. Et refuser de baisser les bras même en cas de lettres de refus qui se succèdent, c'est peut-être ça, aussi, être écrivain.

IMG_3597

A part ça, Germain, Antoine, Tonton René, Jacques, Raymond, Sarah, Paul, Gisèle, Léon, Charles, Mathilde et Pierre André Bidule vont très bien, merci. Et ce en dépit de certaines aventures rocambolesques, voire terrifiantes. Après un portrait puis une première scène, nous en avons, hier, rédigé une autre encore, histoire de leur donner un peu plus d'épaisseur. L'occasion de voir des personnalités émerger, des caractères se tremper ou des décors se planter de plus en plus solidement. Aujourd'hui c'est donc le dernier jour et notre mission consistera à inventer une rencontre entre notre personnage et l'un des onze autres. Un défi de taille lorsqu'on voit la diversité des univers de chacun. 

IMG_3605

Suite et fin demain…

Edit: Pour rappel, je suis donc pendant quatre jours un atelier d'écriture organisé par la Fondation Bouygues télécom  "Nouveaux talents". Dans le cadre d'un partenariat avec la fondation, j'ai pour mission, outre de m'imprégner religieusement des conseils avisés de Bruno Tessarech, de relater ici cette expérience.

Edit2: Je tiens vraiment à vous remercier des commentaires postés ce week-end. C'est pour moi un vrai plaisir d'écrire ces chroniques d'ateliers mais je n'étais pas certaine qu'elles vous intéresseraient. Au vu de vos petits mots, c'est plutôt le cas et cela me touche, vraiment.

Labo d’écriture des Nouveaux talents #2

Securedownload-1

Il s'appellent Germain,  tonton René, Paul, Mathilde, Gisèle ou encore Antoine. Ils ont entre 25 et 59 ans et pourtant, ils sont tous nés dans la nuit de vendredi à samedi. L'un a gagné au quinté plus, l'une copiste et mysanthrope. L'un bouscule les gens dans le métro, un autre encore est un infidèle pris au piège de ses errances. Ils sont promis à une longue vie et viendront peut-être hanter les pensées des futurs lecteurs, ou peut-être ne survivront-ils pas à ces quatre jours d'atelier d'écriture.

Ils sont nos personnages, nés de nos imaginations plus ou moins fertiles. Ils appartiennent encore chacun à leur auteur mais montrent déjà des signes d'impatience et une volonté manifeste d'émancipation. Incroyable comme en quelques heures, alors que cela me semblait pour ma part improbable, nous sommes tous parvenus à façonner ces hommes ou ces femmes, leur inventer un passé, des goûts et des dégoûts, une relation à l'autre et même, parfois, un destin. Un processus totalement fascinant pendant lequel Bruno nous guide, en distillant avec une immense bienveillance quelques conseils l'air de rien.

Il nous dit par exemple qu'écrire, c'est avant tout ne pas écrire. Une manière de nous rappeler l'importance de ces heures passées à penser à nos personnages, ce qu'on peut nommer inspiration, réflexion ou maturation.

Il dit, paraphrasant le poète Pessoa, que les livres existent parce que la vie ne suffit pas.

Il dit aussi que les rituels d'écriture sont là pour donner une colonne vertébrale à cette drôle de forme de création, qui ne répond pas à beaucoup de normes.

Il cite l'exemple de cet écrivain qui ne pouvait écrire qu'assis sur le rebord de sa baignoire, l'ordinateur posé sur un minuscule bureau. De l'inconfort jaillissaient les mots. Il parle aussi de Nathalie Sarraute, qui rédigea tous ses ouvrages  dans le bistro d'en bas de chez elle, saisissant parfois au vol les dialogues des habitués pour les intégrer dans ses histoires.

IMG_3601

C'est sur ce point précisémment qu'il m'a le plus intéressée. Cette invitation à ne jamais négliger le hasard comme prescription d'écriture. A savoir, en cas de panne d'inspiration, en appeler au réel pour relancer la machine. Cela peut être le choix d'un mot dans le dictionnaire, le premier de la 14ème page, au pif, que l'on s'astreindra à placer dans la future scène. Ou bien un téléphone qui sonne opportunément dans le salon et qui vient également surprendre nos personnages.

Cela peut être un cimetière dont les pierres tombales fourniront des noms aux consonnances vintage à un écrivain en panne de patronymes. Certains auteurs, nous a raconté encore Bruno, poussent le processus jusqu'à ne pas inventer un numéro de téléphone, parcourant des annuaires pour dénicher celui qui conviendra le mieux, ou arpentant les bouquinistes pour trouver de vieilles plaques de rue qui donneront une adresse parfaite à leur héros.

IMG_3606

Vous l'aurez compris, nous buvons les paroles de notre professeur, à tel point que parfois, j'en oublie personnellement que je suis là pour écrire. Je me demande de plus en plus si je ne suis pas meilleure "écoutante" qu'écrivaine. Une chose est certaine, il m'a donné envie de relire Balzac, Hemingway, Faulkner et tant d'autres. Ce qui à priori est une bonne chose parce que Bruno est formel: écrire, c'est aussi pour une bonne part, lire. Ça, j'ai bon. 

IMG_3618

Edit: Pour rappel, je suis donc pendant quatre jours un atelier d'écriture organisé par la Fondation Bouygues télécom  "Nouveaux talents". Dans le cadre d'un partenariat avec la fondation, j'ai pour mission, outre de m'imprégner religieusement des conseils avisés de Bruno Tessarech, de relater ici cette expérience.

L'épisode #1 est ici.

Labo d’écriture des Nouveaux talents, #1

IMG_3572
C'est une petite pièce bleue, comme une bulle au milieu du salon du livre. Un labo d'écriture, qui pendant quatre jours sera ma deuxième maison, partagée avec 11 autres aspirants écrivains* et notre vénérable professeur, Bruno Tessarech, auteur de son état.

Hier, c'était le premier épisode de ces quatres séances et je dois bien vous avouer que je n'en menais pas large. C'était amusant la façon dont timidement nous nous sommes présentés les uns au autres, avec probablement cette question en suspens: "qu'est-ce qu'il ou elle a dans le ventre, vais-je être impressionnée, vais-je le surprendre ?".

Très vite des ébauches de réponses. Le premier exercice consistait à nous décrire, sous la forme d'un texte, histoire d'échapper aux barbantes présentations sous forme de CV: "Caroline, 40 ans, trois enfants, journaliste".

Nous avons égrené les uns après les autres nos autobiographies et petit à petit, les caractères façon La Bruyère se sont dessinés. Vincent, un enfant, bientôt un autre, travaille dans l'informatique. Bénédicte, fut comédienne mais ne veut plus qu'écrire. Charles, Limoges, a des personnages dans sa tête et ne demande qu'à les faire vivre. Patrick  qui n'aime pas l'avion ni arriver en retard débarque en cours de route après avoir manqué son vol. Laetitia est bretonne avant tout et un sens de la formule qui fait mouche à tous les coups. Marion vient de Lyon et voudrait parvenir à terminer ses histoires, etc.

Au moment de lire ma prose, je ne cacherai pas avoir eu la voix qui tremblait et l'envie de disparaitre. Et puis finalement, l'intérêt d'un jeu auquel tout le monde participe, c'est que justement, tout le monde participe. Très vite la peur du jugement s'évanouit, ne reste plus que le plaisir d'être rassemblés pour la même cause: trouver nos mots.

La suite de la séance s'est passée à réfléchir sur ce qui fait l'essence d'un roman. Et de nous apercevoir que nous étions nombreux, moi y compris, à faire fausse route: l'intrigue arrive après, bien après les personnages. Et ce même dans ce genre le plus symptomatique en la matière: le polar. Preuve à l'appui, nous a démontré Bruno Tessarech: "je vous dit Conan Doyle ? Sherlock Holmes. Fred Vargas ? Adamsberg. Agatha Christie ? Hercule Poirot". Etc etc etc. 

  IMG_3574

Notre prochaine mission releva donc de l'évidence: trouver notre personnage. Celui à qui nous donnerions sinon vie, au moins quelque substance dans les jours à venir. Le décrire, dans un premier temps, pour qu'il prenne corps. Sans tomber dans le piège consistant à rédiger malgré nous ce qui serait la première page d'un roman. Piège dans lequel j'ai non seulement sauté à pieds joins mais même plus encore: en lieu et fait d'un portrait, j'avais écrit un synopsis.

Il n'empêche qu'à l'issue de ces quatre heures, lorsque nous avons fermé la porte de notre maison bleue, je suis presque sûre d'avoir entendu les murmures de douze personnages, déjà en mal de leurs auteurs. Et lorsque ce matin nous sommes arrivés, nous avons chacun, presque instinctivement repris nos places avec le sentiment de retrouver ceux que nous avions laissés la veille.

A suivre…

IMG_3573

Edit: Pour rappel, je suis donc pendant quatre jours un atelier d'écriture organisé par la Fondation Nouveaux talents. Dans le cadre d'un partenariat avec la fondation, j'ai pour mission, outre de m'imprégner religieusement des conseils avisés de Bruno Tessarech, de relater ici cette expérience.

Edit2: Un grand merci à Céline et Dorothée, nos deux marraines qui se penchent tous les matins sur notre berceau.

* Patrick, Charles, Pascale, Laetitia, Benedicte, Marion, Marie, Mélisande, Vincent, Karine et Céline